paysage et droits de l'homme

De nos jours, un paysage est plus qu’un simple tableau ou un beau panorama ; dans la littérature théorique on le considère plutôt comme une relation culturelle entre l’environnement et des êtres humains.  Prenons par exemple l’article 1 de la Convention européenne du paysage du Conseil de l'Europe (2000), selon lequel « ‘Paysage’ désigne une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l'action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ». Un paysage est donc créé par la perception humaine, et on peut estimer qu’il puisse être traité comme un vrai bien commun.

Le paysage peut être considéré non seulement en tant que bien commun, mais également comme bien publique. C’est-à-dire que, pour ce qui est des générations futures, il convient de sauvegarder la possibilité de relations socio-politiques se jouant dans les paysages, autant que de protéger  l’environnement. Dans plusieurs textes et déclarations le caractère de bien commun ou de bien public du paysage est accentué pour souligner un engagement à améliorer et à renforcer sa relation inhérente entre nature et culture.

Les concepts de ‘paysage’ et de ‘bien communs’ sont depuis toujours entrelacés par des lois et des coutumes réglant la gestion de la terre. Même aujourd’hui les grandes déclarations mentionnent la participation bottom-up (de bas en haut) et la gouvernance collective parmi les objectifs primordiaux de la gestion contemporaine de paysages. On reconnaît en plus que la perception du paysage (soit urbain, soit rural) contribue à la construction d’une identité sociale. La Déclaration de Florence sur le paysage 2012 de l’UNESCO établit même un lien entre paysages et droits de l’homme (comme le fait également la Convention européenne du paysage déjà mentionnée, à laquelle d’ailleurs se réfère le ministre wallon de l’environnement dans ses décisions sur l’implantation de centrales éoliennes).

Il y a un lien entre droits de l’homme et paysages, non seulement lorsqu’il s’agit de zones conflictuelles ou de territoires indigènes, mais également quand il s’agit des  paysages et des environnements de tous les jours qui sont menacés et abîmés. De ce point de vue, le paysage devient ‘éthique’, plutôt que simplement esthétique. De là aussi l’importance de réfléchir sur un ‘droit au paysage’ pour exprimer cette relation avec les droits de l’homme. Si l’on considère (la perception d’) un paysage comme un bien commun et public, impliquant diverses fonctions et capacités de gestion collective, on peut en déduire ou y attribuer des droits. Une population aurait droit au respect du paysage dans la résolution de divers conflits sociaux ; le paysage lui-même aurait droit à la protection et la sauvegarde à plusieurs niveaux (y compris faune et flore).

 

Laura Menatti, ‘Landscape: from common good to human right’, International Journal of the Commons, Vol. 11, no 2 2017, pp. 641–683

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